Traduction gratuite – Recourir à la traduction en ligne: vraie bonne idée ou piège?

Traduction gratuite: Retour sur les débuts de la traduction automatique

L’idée d’automatiser des traductions à l’aide de machines électroniques naît en 1946, dès l’apparition des premières calculatrices électroniques, lorsque le britannique A. D. Booth, électronicien au Birbeck College de Londres, sollicite auprès de W. Weaver, mathématicien, cybernéticien et vice-président de la fondation Rockefeller, l’aide financière américaine pour construire le premier ordinateur britannique. Les premières expériences engagées en 1948 par A. D. Booth et R. H. Richens, relayées en 1949 par le Memorandum de W. Weaver, suscitèrent des recherches dans plusieurs universités américaines. Celles-ci furent rapidement évaluées par un premier rapport de Y. Bar-Hillel en 1951, suivi d’un colloque en 1952.

4En janvier 1954 eut lieu à New York la première démonstration sur ordinateur, une machine IBM 701, qui déclencha une accélération des recherches. Il s’agissait de la traduction de russe en anglais de phrases utilisant un vocabulaire de 250 mots et six règles de syntaxe mises au point par la Georgetown University. Bien que très limitée, cette démonstration fut montée en épingle par la presse et fit grande impression sur le public et certains scientifiques.

Les premières expériences de traduction automatique étaient placées sous la pression d’une demande sociale croissante en traductions scientifiques et techniques, ce dont témoigne un rapport de l’Unesco de 1953. Cette pression, sous forme de demande de l’État soviétique en traductions multilingues, conduisit dès 1931 l’ingénieur soviétique Smirnov-Troianski à élaborer le premier projet de machine à traduire. Aux Etats-Unis, en 1954, la demande se trouva accrue par les possibilités qu’offraient les calculatrices électroniques. Outre des intérêts strictement militaires et politiques liés à la période de guerre froide, la traduction des articles russes, notamment dans le domaine spatial, était jugée indispensable par les scientifiques américains. La démonstration IBM-Georgetown suscita le financement de nouveaux groupes aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne grâce à des subventions de la NSF (National Science Foundation) et de la CIA.

Les outils de traduction en ligne actuels

Les traductions automatiques produites par ces outils de traduction n’ont cessé d’être améliorées. Pourtant, peuvent-ils produire des traductions convenables, véritablement correctes et dont le contenu est acceptable ? 

les points forts des traductions en ligne:

La traduction de mots et de termes seuls est l’un des points forts des outils de traduction en ligne actuels, cela inclut également les termes techniques, et ce même dans le domaine juridique. Par exemple le terme « Amtsgericht » (en français : tribunal de première instance) a été correctement traduit en « local court » (en français : tribunal local) chez Bing.

Ce qui est impressionnant d’une part c’est que Bing inclut maintenant le contexte des mots qui ont plusieurs significations (les homonymes), par exemple avec le mot « Schloss » (en français : château). Si vous entrez seul le mot « Schloss » Bing le traduit d’abord par « castle » (en français : château). Cependant Bing modifie la traduction en temps réel en fonction de la saisie du texte. Si vous entrez „Der Schlüssel blieb im Schloss“ (en français : la clé est restée dans le château), Bing traduit dans un premier temps „The key remained in the castle“ (en français : la clé est restée dans le château). Si l’on ajoute le mot « stecken », c’est-à-dire que la phrase serait la suivante « Der Schlüssel blieb im Schloss stecken » (en français : la clé est restée coincée dans la serrure) alors Bing change complètement la traduction en « The key remained stuck in the lock » (en français : la clé est restée coincée dans la serrure) et cela est correct. En ce sens, Bing a certainement évolué au cours des dernières années notamment en prenant en compte le contexte, ce qui n’était pas le cas à ses débuts. 

Pour Google Traduction, on traduit par « lock » le mot « Schloss » peu importe qu’il soit écrit en majuscule ou en minuscule. Toutefois Google Traduction affiche une liste d’autres traductions possibles, par exemple castle ainsi que des synonymes en allemand pour « Schloss ».

Les points faibles des traductions en ligne:

Les verbes pronominaux:

En ce qui concerne les verbes pronominaux, Bing n’est pas capable de les différencier et il n’est pas non plus capable de tenir compte de la différence de sens qu’il y a entre un verbe dans sa forme non pronominale par rapport à la forme pronominale. 

Voici un autre exemple :

versprechen-sich versprechen (en français : promettre – se tromper en parlant)

Versprechen (Bing : « promise » (en français : promettre)), sich versprechen (Bing garde « promise ») Google indique « to promise oneself » (en français : se promettre)

Que se passe -t-il avec :

„Entschuldigung, ich habe mich versprochen.“ (en français : Excusez-moi, je me suis trompé.)

(Google Traduction : Excuse me, I promised myself) (en français : Excusez-moi, je me suis promis) Même quand on ajoute un mot dans le but de clarifier, comme dans :

„Entschuldigung, ich habe gerade mich versprochen“ (en français : excusez-moi, je viens juste de me tromper)

Bing garde sa traduction et l’enrichit simplement avec :

„Sorry, I just promised myself“ (en français : désolé je viens juste de me promettre)

Google Traduction : „Excuse me, I just promised myself“ (en français : excusez-moi je viens juste de me promettre)

Les expressions idiomatiques

Exemple : It was raining cats and dogs. (Expression anglaise imagée qui signifie en français :il pleut des cordes)

Bing nous donne :

„Es war Regen Katzen und Hunde“ (en français : c’était la pluie les chiens et les chats)

La bonne réponse serait : „Es regnete in Strömen.“ (Expression allemande imagée qui signifie en français :il pleut des cordes)

Google Traduction semble mieux s’en sortir ici.

Le programme traduit correctement l’expression idiomatique avec „Es schüttet wie aus Eimern.“ (Expression allemande imagée qui signifie en français :il pleut des cordes)

Dialecte

Exemple : Pfüa Gott, Pfüat Eich (expression utilisée dans le sud de l’Allemagne)

Certes, Bing reconnaît « Gott » (en français : dieu), mais il ne peut rien faire avec « Pfüa » et reconnaît « Eich » comme « Eiche » (en français : chêne) ce qui en fait « oak » (en français : chêne)

Google Traduction : ne peut rien en faire non plus et indique : „Pfüa God, Pfüat Eich“, il ne traduit que„Gott“

Autres points faibles – remarques générales :

Une traduction gratuite élaborée par un programme informatique ne peut pas être traduite pour un groupe cible spécifique. Cela ne peut être fait que par un traducteur expérimenté qui a reçu des informations appropriées de la part de son donneur d’ordre. 

Les avantages et les inconvénients fondamentaux de la traduction automatique par rapport à la traduction humaine font souvent l’objet d’études, d’analyses et de débats en linguistique et en traductologie et l’on peut regarder sur Youtube quelques discussions ou conférences  d’universitaires dans ce domaine ; malheureusement seulement en anglais ; par exemple la conférence Man vs. Machine:Translation in the Digital Age (en anglais) à l’université de l’Arizona.

D’après la présentation MORE THAN WORDS Translating culture (en anglais) dans la langue, nous avons clairement ici les faiblesses des traductions générées par l’ordinateur.  Dans une conférence organisé par Microsoft Research sur le thème de Future (Present?) of Machine Translation (en anglais) le principe de la traduction neuronale est expliqué. Au niveau des sous-mots, les préfixes et les suffixes sont pris en considération. Une autre conférence en anglais avec le titre A Practical Guide to Neural Machine Translation explique comment les réseaux de neurones prennent en considération plusieurs mots à la fois. 

Quand une traduction gratuite en ligne a-t-elle du sens ? 

Même ce qui est gratuit peut être bien. Une traduction automatique peut être utile quand on veut se renseigner sur le contenu d’un site internet en langue étrangère avec une vue d’ensemble et si l’on accepte que tout ne soit pas correctement reproduit. Une traduction automatique peut également être utile quand on se rend dans un autre pays et que l’on veut s’informer rapidement sur internet sur un thème précis.

De plus une, traduction automatique peut être utile à des fins professionnelles lorsque l’on a besoin d’une traduction simple et que l’on est conscient du fait que la traduction doit absolument être retravaillée si l’on veut la publier. En outre une traduction automatique peut être utile pour comprendre un texte dans les grandes lignes. 

Un article de blog de l’entreprise Linguatec (en allemand) énumère d’autres domaines d’application de la traduction automatique. Cela inclut :

  • Les communications internationales par email ou les correspondances commerciales (qui peuvent donc être traitées bien plus rapidement) 
  • Les documents déjà existants qui peuvent être mis à disposition pour les associés ou les succursales à l’étranger dans leur propre langue 
  • Pour la traduction de textes techniques, par exemple les documents, les manuels, les modes d’emploi, etc. Notamment pour les textes normalisés ou pour les textes largement standardisés, la traduction automatique est très efficace (notamment par l’utilisation d’archives de phrase)

Quand une traduction gratuite n’a-t-elle pas de sens ?

Dans l’ensemble du secteur des traductions littéraires, également dans le domaine des traductions de romans, de poésie lyrique et de poèmes, la traduction automatique ne devrait pas être utilisée, car les auteurs sont des artistes de la langue et utilisent souvent des mots dans des combinaisons moins courantes. Les ordinateurs ne peuvent pas percevoir les nuances même s’ils ont été enrichis de textes littéraires et de leurs traductions. Sans contrôle humain, on ne devrait en aucun cas se fier exclusivement à la traduction automatique pour les traductions automatiques ; peu importe le domaine. 

Ainsi le recours à la traduction automatique est déconseillé:

  • pour les entreprises qui veulent être prises au sérieux
  • pour les sites internet d’entreprises 
  • pour les traductions spécialisées dans les domaines suivants (cette liste ne donne que quelques exemples) : l’économie (en allemand), les affaires (en allemand), les finances ,le secteur informatique ainsi que le secteur des télécommunications , le droit, l’industrie pharmaceutique (en allemand), l’industrie automobile, le tourisme (en allemand), la technologie et l’industrie (en allemand), la médecine (en allemand), les logiciels et internet, la construction mécanique, l’aviation et la navigation spatiale, la politique, le marketing

Le choix de la traduction humaine

Dès le départ, les avantages de la traduction humaine résolvent la plupart des inconvénients de l’approche automatique :

  • Aller au-delà de la traduction : la traduction humaine ne concerne pas que les mots, il s’agit d’utiliser la pensée critique et la connaissance d’une culture pour transmettre un message qui ait un impact sur le public de chaque marché.
  • Ton de la marque : la traduction humaine est actuellement la seule manière de transmettre la « voix » de votre marque en prenant en compte des nuances de langue auxquelles les machines ne sont pas sensibles.
  • Incitation à la créativité : les phrases soigneusement choisies de votre entreprise sont mieux transmises, car elles sont traduites par des humains qui maîtrisent la langue et la culture.
  • Des traductions sur mesure pour la marque : encore une fois, il ne s’agit pas de traduire mot à mot mais de comprendre l’esprit du texte et le message de la marque. Celui-ci sera toujours mieux compris et mieux adapté par un être humain connaissant le positionnement de la marque.
  • Avantages SEO (optimisation pour les moteurs de recherche) : les traducteurs humains savent choisir les phrases les mieux traduites dans le cadre d’une stratégie SEO internationale. Pour l’instant, la traduction automatique n’en est pas capable.

H.-D. Maas: Das Saarbrücker Übersetzungssystem SUSY. In: Sprache und Datenverarbeitung. 1978

 

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