Le défilé du 14 juillet : retour sur toute une histoire de France

 

Le 14 juillet, les siècles défilent. Clé de voûte de la fête nationale, le cortège militaire trouve son origine chez les Romains. Ceux-ci offraient une fastueuse cérémonie à leurs généraux, en récompense de leurs victoires. Déjà, une République célébrait son armée. Déjà, officiers et soldats traversaient la ville selon un parcours symbolique. Le défilé fait partie de l’ADN du 14 Juillet.

Fête nationale annuelle sous la IIIe République

Celui-ci est devenu fête nationale annuelle sous la IIIe République, à un moment où le régime peinait à s’établir. L’armée aspire alors à retrouver sa fierté bafouée en 1871 avec la perte de l’Alsace-Moselle. À ses officiers, en majorité royalistes ou bonapartistes, le défilé du 14 Juillet parle de revanche. Aux conscrits, il rappelle leurs aînés volontaires qui sauvèrent la République à Valmy, en 1792.

Mais, datée du 6 juillet 1880, la loi qui institue la fête nationale omet à dessein de préciser ce que célèbre la France. Le jour renvoie à la prise de la Bastille en 1789 ou à la Fête de la Fédération en 1790. Libre à chacun de choisir sa référence historique.

Après les foins et avant la moisson, le moment se prête aux célébrations en plein air. Pour les organiser, les communes s’inspirent d’une autre fête : celle du 15 août, fête nationale sous le second Empire. Son canevas comprenait déjà un défilé des troupes, dans les villes de garnison, et des fanfares ou des pompiers ailleurs.

Le 14 juillet 1919, le défilé dit « de la Victoire »

Que représente réellement le 14 Juillet ? « Un moment confondant le peuple, l’armée et les pouvoirs publics dans une commune fraternité. » Les mots de Léon Gambetta sont toujours d’actualité.

Bernard Richard, spécialiste des emblèmes de la République (1), précise : « Le défilé du 14 Juillet est, depuis le début, l’occasion de remercier l’armée d’être et de rester fidèle à la nation. Encore aujourd’hui, il dit la reconnaissance du peuple et des autorités pour ce que les militaires accomplissent. »

Pendant dix ans, à partir de 1880, le 14 Juillet est fêté avec ferveur, puis il adopte un rythme routinier. Rémi Dalisson, historien des célébrations publiques (2), distingue huit défilés d’exception.

Celui dit « de la Victoire », en 1919, est le plus mémorable : mille mutilés de la Grande Guerre ouvrent la marche, devant les maréchaux Joffre et Foch à cheval. La vision est bouleversante. Ce jour-là, les Champs-Élysées acquièrent un caractère sacré. Par la suite, d’autres itinéraires ont été essayés. Mais ni l’axe de la Bastille à la Nation, retenu en 1936 par le Front populaire, ni la place de la République ou le cours de Vincennes, investis sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing, n’ont convaincu.

Y toucher, c’est s’en prendre à une tradition nationale

Quant à la fête elle-même, elle a parfois été moins consensuelle. La contestation surgit dès 1880 mais, après 1968, les critiques visent spécifiquement le défilé militaire. L’époque est à l’antimilitarisme et à l’objection de conscience dans les milieux de gauche.

Pourtant, en 2011, quand Eva Joly, candidate à l’élection présidentielle de 2012, propose de supprimer le défilé, elle provoque un tollé. Y toucher, c’est s’en prendre à une tradition nationale. Une tradition qui étonne de la part d’une grande démocratie occidentale, un tel déploiement de force étant plutôt attendu des pays totalitaires.

« Les étrangers, témoigne Rémi Dalisson, sont surpris et fascinés par notre 14 Juillet. L’omniprésence des références historiques et la tonalité cocardière de la fête leur paraissent typiquement françaises. Ils y voient une particularité, qui s’explique. »

Un signe fort d’unité nationale

La parade du 14 Juillet serait-elle plus qu’une attraction ? Pour Pierre Servent, spécialiste des guerres (3), « le défilé est spectaculaire mais ce n’est pas un spectacle. Depuis les attentats de 2015, les Français ont pris conscience du lien entre les opérations extérieures et celles, intérieures, de lutte contre le terrorisme. Ceux qui défilent mettent leur vie en danger pour nous et pour nos valeurs ».

En 1994, les soldats français et allemands de l’Eurocorps ont descendu côte à côte les Champs-Élysées. Un signe fort. Depuis, des unités étrangères sont régulièrement invitées à défiler. Cette année, le thème est donné : que la France, son armée et ses alliés opèrent « ensemble pour une paix d’avance ». L’Histoire et les 14 Juillet les y ont entraînés.

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